Ce qu’il faut connaître de la loi Hamon : un guide pour les dirigeants

La loi Hamon, du nom de l’ancien ministre de la Consommation, a profondément modifié le paysage des cessions d’entreprise. Elle impose des obligations précises aux cédants, afin de garantir les droits des salariés. Mais quelles sont exactement ces obligations ? Et comment s’y conformer ?

Les obligations du cédant : informer et impliquer les salariés

Lorsqu’un dirigeant envisage de céder son entreprise, il doit impérativement informer ses salariés. Cette obligation vise à leur permettre de connaître les contours de l’opération et, le cas échéant, de présenter une offre de reprise.

  • À qui s’adresse l’obligation ? Le dispositif d’information des salariés s’impose aux catégories d’entreprises suivantes :
    •  d’une part, les entreprises qui n’ont pas l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise;
    • d’autre part, les entreprises qui ont l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise et qui ont moins de 250 salariés et  qui réalisent un chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 50 millions d’euros ou dont le total de bilan n’excède pas 43 millions d’euros.
    • Pour cette dernière catégorie, ces critères cumulatifs sont appréciés au niveau de l’entreprise, indépendamment de son rattachement éventuel à un groupe.
  • Quelles sont les opérations concernées ? L’opération doit concerner la vente :
    • D’un fonds de commerce, ou ;
    • D’une participation représentant plus de 50 % des parts sociales d’une société à responsabilité limitée ou, le cas échéant,
    • D’actions ou valeurs mobilières dont le bloc donne accès à la majorité du capital d’une société par action.
  • Quelles sont les opérations non concernées ?

La vente d’un bloc minoritaire à un autre actionnaire lui conférant la majorité du capital ne relève pas de l’obligation d’information des salariés (cas des ventes minorires intragroupes).

Par ailleurs, le droit d’information des salariés n’est pas applicable :

  • Aux ventes à un conjoint, un ascendant ou un descendant ;
  • Aux entreprises faisant l’objet d’une procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires ;
  • Quels sont les délais ? la réalisation de la vente ne peut intervenir avant un délai de deux mois après que tous les salariés ont été informés de l’intention du propriétaire de vendre le fonds ou ses parts sociales. Le délai de deux mois s’apprécie au regard de la date de conclusion du contrat de vente (décret n°2015-1811 du 28 décembre 2015 relatif à l’information des salariés en cas de vente de leur entreprise).
  • Quel est le formalisme ? Il est recommandé de réunir tous les salariés pour communiquer sur l’éventualité d’une cession de l’entreprise. A cette occasion, vous pouvez faire signer une lettre d’information remise en main propre. Vous pouvez également à l’issue de la réunion envoyer le courrier en recommandé avec accusé de réception.
  • Quel est le contenu de la lettre d’information ? Le vendeur et/ou l’entreprise n’ont d’obligation d’informer les salariés que :
    • de la volonté du vendeur de procéder à une vente.
    • du fait que les salariés peuvent présenter une offre d’achat.

 La loi n’impose la transmission d’aucune autre information et d’aucun document relatif au fonctionnement, à la comptabilité ou à la stratégie de l’entreprise.

Modèle de courrier type

Modèle de lettre d’information de la vente de 50 % des parts sociales d’une SARL Monsieur X Société Y Adresse Monsieur Z Lettre remise en mains propres contre signature Monsieur, Nous vous informons par la présente, sans qu’elle constitue une offre de vente, en application des dispositions de l’article L.23-10-1 du code de commerce, que Monsieur X, associé majoritaire de la SARL Y, souhaite vendre une participation représentant plus de 50 % des parts sociales. En tant que salarié de l’entreprise, vous avez la possibilité de présenter une offre d’achat pour cette participation. Si vous ne souhaitez pas présenter d’offre d’achat pour cette participation, nous vous remercions de bien vouloir compléter et nous retourner le formulaire joint. Nous vous rappelons que vous êtes tenus à une obligation de discrétion, s’agissant de ces informations, dans les conditions prévues à l’article L. 23-10-3 du code de commerce, susceptible d’engager votre responsabilité civile et une procédure disciplinaire. Vous avez la possibilité de vous faire assister par la personne de votre choix. Dans ce cas, vous serez tenu d’en informer le chef d’entreprise dans les meilleurs délais et la personne qui vous apportera une assistance sera soumise à une obligation de confidentialité. Remis en mains propres le : Date et signature chef d’entreprise Date et signature salarié

Source : https://www.economie.gouv.fr/

Formulaire de lettre de renonciation  Monsieur Z Adresse Madame, Monsieur, Pour faire suite à votre courrier du __.__.__ m’informant de l’intention de M. X de vendre une participation représentant plus de 50 % des parts sociales de l’entreprise Y, je vous informe par la présente de ma décision de ne pas présenter d’offre d’achat.  Daté/signé  

Source : https://www.economie.gouv.fr/

  • Quels sont les conséquences en cas de non-respect de la loi ? Lorsqu’une action en responsabilité civile est engagée, la juridiction saisie peut prononcer une amende dont le montant peut atteindre 2% du montant de la vente.

En conclusion,

Au-delà du principe de la loi Hamon, qui impose aux cédants une obligation d’information envers les salariés, le législateur souhaitait à l’origine, pouvoir impliquer les salariés dans un projet de reprise de leur entreprise.

Force est de constater que la confidentialité, qui entoure une cession d’entreprise est peu compatible avec cette obligation d’information. Les cédants ont intérêt à retarder la connaissance de l’opération de cession afin de préserver les relations avec les clients, les fournisseurs et…les salariés tant que le process n’est pas en phase avancée.

 Cela étant, en choisissant bien le momentum de l’information, les dirigeants peuvent sécuriser leurs opérations de cession et préserver un climat social serein au sein de l’entreprise.

Conseils pratiques pour les dirigeants :

  • Anticiper : Prévoir l’information des salariés dès le début du processus de cession.
  • Se faire accompagner : Consulter un avocat spécialisé en droit social pour s’assurer de respecter l’ensemble des formalités légales.
  • Communiquer : Organiser une réunion d’information avec les salariés pour répondre à leurs questions.

En respectant ces recommandations, les dirigeants pourront mener à bien leur projet de cession en toute sérénité.